Ce site, propriété de Paris Habitat, est promis à la destruction. Ses locataires relogés, les logements sont donc à présent vacants. Dans l'intervalle et dans l'attente du lancement de l'opération de construction pour une offre nouvelle de logements sociaux, Paris Habitat a proposé au groupe SOS solidarités de bénéficier de logements pour les besoins de ses dispositifs d'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile (HUDA).
Paris Habitat a ainsi investi le champ de l'habitat dit « intercalaire ». « C'est une solution temporaire de mise à disposition de surfaces vacantes à des fins sociales » explique Nina Kechidi, chargée d'action locative à Paris Habitat. « Les logements que nous ciblons sont alors bloqués, avant les travaux, pour une durée pouvant aller de quelques mois à quelques années » poursuit-elle.
Comme un prolongement de ses missions sociales et considérant le logement comme un facteur déterminant la bonne insertion, Paris Habitat accueille donc, par l'intermédiaire d'associations ou d'organismes publics qui en auraient besoin, des familles, des personnes isolées ou des demandeurs d'asile.
C'est par exemple le cas à Tolbiac depuis 2018. « A Tolbiac, nous louons 7 logements au groupe SOS solidarités, spécialisé dans l'hébergement d'urgence mais aussi 2 à l'association Saint-Vincent-de-Paul ainsi que 2 autres logements à un centre qui fait de l'accompagnement à la parentalité » indique N.Kechidi.
Des résidents comme Sorab, jeune afghan de 24 ans, arrivé en France en 2020 et demandeur d'asile. Il occupe l'un des logements confiés à SOS solidarités. « Nous sommes 6 dans notre appartement, deux par chambre » indique-t-il. « C'est une vraie chance d'être logé ici après des premiers mois en France compliqués, où j'étais seul. Ce logement a changé ma vie. Je dois y rester 8 mois » confie-t-il. L'objectif est toutefois de leur faire considérer ce logement comme le leur. Les résidents cuisinent eux-mêmes, disposent d'une salle de bain commune et d'un espace à eux.
Ce matin-là, Jean-Marie Deutcho, moniteur éducateur pour le groupe SOS Solidarités, est venu à Tolbiac pour rendre visite à ses résidents. « Chaque logement compte 6 à 7 personnes, en fonction de l'espace et du nombre de chambre » indique-t-il. Sorab et ses compagnons sont les premiers sur la liste de ses « visites à domicile ». Affecté au pôle asile-intégration, sa « mission est complémentaire de la tâche de nos assistantes sociales, essentiellement administratives et tournée vers le suivi des procédures. En tant qu'éducateur, nous gérons le quotidien, accompagnons nos résidents. Je dois m'assurer qu'ils ne sont pas isolés, que tout va bien. Ce n'est pas une visite de contrôle. C'est aussi l'occasion de les rencontrer en dehors de nos bureaux, de co-construire également avec eux leurs activités et leurs projets. Dans cet appartement par exemple, nous avons refait, à leur initiative, la peinture de la cuisine » explique J-M.Deutcho.
Tolbiac n'est pas le seul site à être concerné par une telle démarche. C'est le cas par exemple d'Exelmans (16e). Cette ancienne caserne de gendarmes patiente avant une transformation lourde qui est programmée. « Le projet futur est complet. 41 logements sociaux, des bureaux également, une crèche de 26 berceaux avec une PMI, et, géré par l'association Aurore, un centre d'hébergement et de stabilisation de 51 places ainsi qu'une maison relai de 23 places » indique Marie-Pascale Arnaudet, cheffe de service à la maitrise d'ouvrage de Paris Habitat et en charge de ce projet.
Ici, comme à Tolbiac, l'intervalle, avant les travaux, est donc mis à profit. « Dans le contexte actuel de tension sur le logement, cela n'a aucun sens de laisser des logements vacants » poursuit M-P.Arnaudet. « Entre la désignation de l'architecte, les études et la consultation des entreprises, il y a ainsi de nombreux mois de patience qui permettent à des associations d'agir, comme ici à Exelmans avec Aurore » conclue-t-elle.
Alors Aurore en effet agit. L'association use en effet de ce site pour développer de nombreuses activités ouvertes sur le quartier. Un restaurant s'est installé. Un atelier de réparation de vélo, des artisans aussi, un compost et des animations sont organisés. Et surtout, l'association qui œuvre à l'accueil des migrants a ouvert les portes des logements du site à 350 d'entre eux.